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La dénatalisation ou la défécondisation ? par Katia Elkaim

Dernière mise à jour : 2 mars 2021


Bien calée dans mon fauteuil-lit, le pistolet distributeur de café à portée de la main, je parcourais les nouvelles du jour.


Un thème récurrent figurait parmi les gros titres : celui de la « dénatalisation ». Depuis la fin des années 2020, le terme de « dénatalisation » avait remplacé celui de dénatalité car il reflétait mieux ce processus dynamique en progression que le simple constat d’une population qui décroît.


J’en avais marre de n’entendre parler que de cela et passai rapidement mon regard à la page suivante. Un article sur le mode de travail attira mon attention. Depuis le « Renouveau » plus d’enjeux écologiques ; c’était du moins vrai dans cette partie du monde, parce que dans l’autre, rien ne semblait avoir changé. Depuis le « Renouveau », la croissance était stable car on dépense moins. Les habitats se sont modernisés pour faire place à des lieux de vie spacieux, confortables et intelligents sur tous les plans. Plus possible d’aller s’approvisionner dans un supermarché depuis que le supermarché nous sert au moyen de canaux souterrains ou de drones.


A l’extérieur, s’épanouissent des dizaines d’essences d’arbres que l’on croyait oubliées et il n’est pas rare de voir, dans les jardins et les parcs, des animaux autrefois en voie de disparition.


Mais voilà, il n’y a plus de bébés !


J’ai voulu en savoir plus et me suis plongée dans la littérature. Premier constat, le thème n’est pas nouveau : William Petty au XVIIème siècle en Angleterre traitait déjà de la fécondité, tout comme Montesquieu en France un peu plus tard, sans parler de Malthus ou encore d’Arsène Dumont. J’ai parcouru les différentes approches du problème, passant des théories économiques aux analyses sociologiques. Bref, chacun y allait de son avis, sans jamais parvenir à un consensus. J’en étais là de mes interrogations, un peu frustrée lorsque je suis tombée sur un tableau synoptique datant de ce bon début du XXIème siècle, juste après la crise du Corona. Le titre en était tout simple : « Où les couples se forment-ils ? »

Bonne question !


En moyenne, à l’époque, plus de 20% des couples se formaient sur le lieu de travail, pourcentage juste talonné par les sites de rencontre. Un autre chiffre attira mon attention, celui de la durée des unions, ou plutôt le caractère statistiquement éphémère des couples qui se sont rencontrés virtuellement.


J’eus une sorte d’intuition et me mis à chercher les statistiques récentes sur le sujet.

Bingo !


Depuis que le télétravail s’est généralisé, comme les nouveaux modes de communication et de restauration à distance, la très grande majorité des couples se rencontre en ligne. Moi-même, j’ai fait la connaissance de mon compagnon de cette manière, convaincue que le passage obligé par les tests psychométriques était un gage de solidité. Bon, je n’ai pas d’enfant et aucune envie d’en avoir et je pris conscience que je contribuais forcément à cette « dénatalisation » dont tout le monde nous rebat les oreilles à journée faite.


Je poursuivis mon enquête, je voulais en avoir le cœur net. Après un sondage auprès de mes meilleurs amis, hommes et femmes, je pus dire que tous, sans exception ont rencontré leur âme sœur à distance. Tous entretiennent avec leur moitié une relation quotidienne très intense et la moitié d’entre eux seulement font physiquement l’amour avec leur partenaire. Tous mes amis, sans exception, ont régulièrement, voire exclusivement, recours à ces robots sexuels inventés au Japon autour de 2020. Pas étonnant que la fertilité soit au centre des préoccupations !


Je revins sur l’article du début. En substance, le journaliste présentait une nouvelle manière de travailler : En lieu et place des terminaux individuels de travail, les auteurs préconisent de se retrouver, par secteur d’activité, dans des espaces communs au centre-ville. Les ressources pourraient ainsi être partagées et les heures de travail mieux définies, mettant ainsi un terme à un autre enjeu de société majeur qui est le travail en continu. Ainsi, en forçant les gens à se déplacer pour travailler dans un lieu différent de leur domicile, il deviendrait plus facile d’encadrer le nombre d’heures d’activité en les rendant aussi plus efficaces. Les bienfaits en seraient multiples, notamment pour les nouveaux modes de restauration extérieurs qui ne peuvent tourner que si les gens ont du temps libre.


Je réfléchis à cette petite révolution, peu convaincue que les mentalités y fussent prêtes.

Cette idée était pourtant séduisante et je repensai à cette statistique selon laquelle les couples, dans l’ancien temps, se formaient au travail et me dis que c’était peut-être la solution miracle.

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