Au sud de l'Éthiopie coule une rivière fraîche et limpide, qui descend des montagnes Guge jusqu'au sud du lac Chew Bahir. C'est un paysage ancien, situé dans la grande vallée du Rift. Il se trouve que c’est aussi ici que l’on y trouve la plus extraordinaire collection de restes d'hominidés de la planète. À cet endroit précis, Homo habilis, Homo rudolfensis et Homo erectus ont mangé leur petit déjeuner et taillé des outils.
La rivière Weito, c’est son nom, marque la frontière entre deux des États régionaux à base ethnolinguistique. Dans l’un de ces petits villages, situé sur l’une des rives, un groupe d'anciens est assis en pleine conversation. Il se peut que d'autres villageois passent devant eux pour se baigner ou se laver dans la rivière, mais aucun d'entre eux n'a la moindre idée de ce dont ils parlent.
Parce ce que ces anciens sont les tout derniers à parler l'Ongota.
En raison des mariages intertribaux, la langue a lentement été dévorée par le Tsamai, la langue de la majorité du village, qui considère désormais l'Ongota comme une langue dépassée et indigne d'eux. Le dialecte est ordonné en « sujet-objet-verbe », et donc "Nigel-vin-boire" pourrait être une phrase Ongota parfaitement correcte et crédible.
Il y a beaucoup d'autres idiomes en voie de disparition, comme le S'aoch du Cambodge, avec ses dix derniers locuteurs - la population qui le parlait ayant été anéantie par les Khmers rouges, il y a cinquante ans - ou l'Ainu, parlé par moins de quinze personnes, originaires d’Hokkaido au Japon ou de Sakhaline, Kouriles, Khabarovsk et du Kamtchatka, en Russie. Il y a la famille des langues Saami, parlées dans le nord de la Norvège, en Suède, en Finlande et en Russie, dont nombre de ses formes comptent moins de dix locuteurs, ou encore le Njerep au Cameroun, dont quatre personnes seulement disent se souvenir de son existence plutôt que de le parler. Il y a enfin des langues qui n'ont plus qu'un seul locuteur et qui disparaîtront avec sa mort, comme l'Apiaka et le Kaixana du Brésil, le Dampal et le Take d'Indonésie et enfin le Yagan du Chili.
Les structures de ces langages peuvent varier considérablement et, comme l'Ongota, avoir un format caractéristique « verbe-objet-sujet » ou « objet-verbe-sujet ». Les étudiants et les chercheurs en typologie linguistique - qui ont plus de six mille langues "reconnues" dans le monde pour les occuper – les classifient aussi en catégories fonctionnelles ; il peut s’agit notamment d'une langue isolante, synthétique, fusionnelle, agglutinante, polysynthétique ou oligosynthétique, mais nous laisserons cela aux experts.
La perte d’une langue est toujours déprimante car elle équivaut aussi à l'érosion ou à l'extinction d'une culture souvent fascinante. Depuis l'introduction de l'Esperanto ou la création de "Online", avez-vous entendu parler d’une nouvelle langue ?
Préparez-vous, cela pourrait changer ! Il y a deux langues, l'une assez nouvelle et en pleine évolution aux États-Unis, l'autre est bien établie mais elle est marginale en Sibérie. Cette dernière pourrait toutefois être réorientée à bon escient.
La première, nous l'appellerons le « Bredouillons » et en voici un exemple :
"Écoutez, ayant le nucléaire, mon oncle était un grand professeur et le docteur John Trump, scientifique et ingénieur au MIT, de bons gènes, de très bons gènes, très intelligent, vous savez, si vous êtes un républicain conservateur, si j'étais un libéral, si comme bien, si je me présentais comme démocrate libéral, ils diraient que je suis l'une des personnes les plus intelligentes au monde ..."
Je ne sais pas comment, ni même si, un linguiste pourrait décrire ce langage sur le plan typologique, mais il me semble que la structure de cette langue n’a pas de sujet. Le plus intéressant, c'est que cette forme de syntaxe semble plaire aux masses.
Alors que le Bredouillo s'impose aux États-Unis, une autre langue pourrait être la clé pour guider le pays de manière plus sensée.
Au centre de la rivière Yenisei, en Sibérie occidentale, on parle une langue ouralienne connue sous le nom de Khanty.
Avec moins de dix mille locuteurs, un certain rajeunissement s’impose, et les États-Unis pourraient être l'endroit idéal pour cela, car le Khanty est un peu unique.
Il s'agit d'un système de langue à preuve ; en effet, les locuteurs sont tenus d'ajouter des preuves à leurs déclarations, de sorte que chaque phrase comporte un marqueur indiquant si celui qui parle a une expérience directe de ce qu’il expose ou s'il a acquis les connaissances par l'intermédiaire d'un tiers. C’est particulièrement utile pour rapporter des nouvelles d'autres endroits, dans une région aussi vaste.
Alors que le nombre de gens parlant le « Bredouillo » ne cesse d'augmenter et maintient les États-Unis dans un état de confusion et de sophisme, le Khanty pourrait bien être la Lingua Veritas nécessaire pour ramener un équilibre dans la rhétorique et donner de l'espoir aux gens.
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