J’ai reçu récemment un email de Google m’indiquant que le compte publicitaire Google Ads de notre entreprise avait été suspendu. Suspendu définitivement.
L’email proposait simplement de remplir un formulaire dans le cas où nous souhaiterions faire appel de la décision,
Nous ne savions pas pourquoi notre compte avait été suspendu, il était donc difficile de faire appel contre cette décision. Nous avions donc décidé d’appeler le support téléphonique de Google Ads.
Nous avons alors expliqué à l’employé de Google que nous n’avions reçu aucun avertissement et que cette suspension avait impacté des milliers de nos clients.
Nous avons appris que notre compte était suspendu car une publicité d’un de nos clients aurait fait la promotion de contrefaçons. Nous avons alors naïvement demandé de nous indiquer la publicité posant problème afin que nous puissions l’enlever et rouvrir notre compte Google Ads.
Malheureusement un conglomérat techno-monopolistique ne fonctionne pas comme cela...
Google nous a alors répondu ne pas pouvoir nous indiquer quelle publicité posait problème, ni comment Google était arrivé à la conclusion que les biens de notre client étaient des contrefaçons, mais que la suspension était permanente et que nous n’avions plus le droit d’ouvrir de nouveaux comptes Google ni en tant qu’entreprise ni en tant qu’individus.
Nous avons alors fait appel de la suspension, en envoyant des documents prouvant l’authenticité des produits de nos clients, et en expliquant qu’il avait dû y avoir une erreur.
Jusqu’à présent nous avons eu quatre entretiens téléphoniques avec Google, nous avons rempli trois formulaires faisant appel de la suspension, et nous attendons toujours.
Nous ne blâmons pas les employés du support Google Ads, mais la seule réponse que nous avons obtenue a été : “Nous n’y pouvons rien, c’est l’algorithme de Google”
Le problème est que nous ne pouvons pas aller chez la concurrence si nous ne sommes pas satisfaits des services de Google. Nous pouvons toujours faire de la publicité sur le moteur de recherche de Microsoft, Bing…Mais voilà !
En Europe et aux Etats-Unis, plus de 90% des utilisateurs d’internet utilisent le moteur de recherche Google.
En 2021 les revenus publicitaires de Google ont augmenté de 69%, pour potentiellement atteindre 200 milliards de dollars par an.
Google consolide donc sa position monopolistique, et n’est pas près d’avoir des concurrents sérieux.
Le problème ne se pose pas seulement pour Google. D’autres entreprises technologiques ont pris des parts de marché gigantesques dans plusieurs secteurs de l’économie, et cela grâce à des disruptions technologiques, puis grâce à des positions quasi-monopolistiques.
Le risque évident est, entre autre, de se retrouver dans des situations similaires à celles que nous avons vécu avec Google. Dans un futur proche, nous pourrions passer rapidement de l’utopie à la dystopie.
Vous pourriez vous retrouver dans les situations suivantes:
● Google devient un acteur majeur dans l’industrie de la santé et vend les données de votre fitness tracker à votre assurance. Vous n’avez pas été au fitness depuis un mois, vous perdez alors votre assurance maladie.
● Votre compte Waymo / Uber est suspendu car vous avez renversé du café sur la banquette arrière. Vous ne pouvez plus vous rendre au travail.
● Votre compte Google Drive / Microsoft Office 365 est suspendu car vous faites trop de fautes d’orthographe, vous ne pouvez alors plus accéder à vos fichiers.
● Votre robot “Femme de Ménage 2.0” Boston Dynamics (ex entreprise de Google) est à l’arrêt car vous ne lui parlez pas poliment. Vous devez faire la vaisselle vous-même.
● Votre tout nouvel implant cérébral Neuralink d’Elon Musk est défectueux, vous devez écrire sur le forum de support pour expliquer le problème, alors que vous n’arrivez même plus à faire un simple calcul mental.
● Vous avez écrit un commentaire sur Amazon.com en proférant des insanités sur la mauvaise qualité d’un produit. Votre compte Amazon est alors suspendu et vous ne pouvez plus finir de regarder votre série sur Amazon Prime Vidéo.
Même le gouvernement des États-Unis s'inquiète de la taille de certaines de ces entreprises.
Ces entreprises prennent également très au sérieux le danger de la régulation de leurs activités. Certaines vont même jusqu’à entraîner leurs employés à ne pas utiliser certains mots comme “dominant”, “unique” ou “leader.
Comment éviter le pire?
En tant que consommateur, il est difficile (pas impossible) d’agir. Par exemple, cet article a été écrit sur un Macbook Apple, en utilisant Google Docs et envoyé par Google Gmail. Vous allez certainement le lire sur un réseau social Microsoft (LinkedIn) ou Instagram (Facebook), depuis votre appareil ayant sûrement un système d’exploitation appartenant à Google, Apple ou Microsoft.
En tant que citoyen, par contre, vous pouvez vous assurer que votre vote ira à un parti politique qui a compris les bénéfices et les risques liés à ces entreprises technologiques. Ces entreprises l’ont bien compris également, puisqu' elles dépensent des millions dans le lobbying des partis politiques.
Même certains grands gagnants de ces mastodontes du numérique s’inquiètent. Marc Andeersen, co-fondateur de Netscape et investisseur chez Facebook, Twitter et Skype a dit:
“We went from being pirates to being the navy. People may love pirates when they’re young and small and scrappy, but nobody likes a navy that acts like a pirate. And today’s technology industry can come across a lot like a navy that acts like a pirate.”
Il y a beaucoup de raisons de se réjouir des évolutions technologiques rapides que nous vivons. En tant que société, nous devons nous assurer que nous ne laissons pas ces technologies dans un très petit nombre de mains.
Notre civilisation aurait été bien différente si l’invention de l’imprimerie avait été la propriété d’une seule entreprise.
Photo by PhotoMIX Company
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