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The Fifth Door (version française) par Nigel Roth



Dans mon couloir, il y a cinq portes. Pourtant, seules trois d’entre elles s'ouvrent sur une pièce.


Deux portes mènent à des salles de réception, le fantasque salon bleu Wedgwood et le très vaste grand salon vert pomme.


Deux portes sont fermées en permanence et ne doivent leur présence qu’à l’obsession géorgienne typique de l'architecte qui a construit ma maison, dont la tournure d’esprit ne lui permettait de penser qu’en termes de proportions classiques et de symétrie compulsive. C’est uniquement pour cela qu’il a placé deux fausses portes dans mon couloir : pour pouvoir dormir tranquille la nuit.


La cinquième porte, qui évoque le premier livre d'une trilogie de Stephen King, ne mesure que cent vingt-sept millimètres de haut, tout en étant une réplique exacte des portes grandeur nature. Elle a été peinte de la même couleur jaune soleil, avec une poignée dorée.


Je me suis souvent agenouillé dans l'alignement de la plinthe bordeaux dans laquelle cette mystérieuse porte a été accrochée à de minuscules charnières, et je me suis émerveillé de voir à quel point les enfants devaient être petits il y a deux cents ans.


Je me demande si Kathleen Mary Norton en a fait de même.


Si cela a été le cas, ce n’était pas ici mais au Cedars, dans le Bedfordshire, en Angleterre.


The Cedars, comme The Limes où je vis, est également une maison de ville géorgienne. Norton y a été élevée dès sa naissance en 1903, l'année même où ma maison est devenue une partie du lycée voisin, comme l'est maintenant sa maison à elle.


Son enfance, on peut l'imaginer, a dû être consacrée à la création des aventures de Homily, Pod et Arrietty. Ils auraient parfaitement pu utiliser ma petite porte.


Norton n’est ni la première, ni la dernière à avoir imaginé que des petits êtres pouvaient vivre des aventures avec des gens plus grands, les "haricots humains", comme ses personnages appellent les adultes.


Rappelons-nous les Voyages de Gulliver de l'écrivain irlandais Jonathan Swift, ou dans le titre d’origine : Travels into Several Remote Nations of the World. In Four Parts. By Lemuel Gulliver, First a Surgeon, and then a Captain of Several Ships” qu'il a écrit en 1726, pour faire la satire de ce qu'il percevait comme la stupidité totale de l'explosion des expériences scientifiques pseudo-utiles, l'étrangeté de la nature humaine et le caractère pathétique de l'écriture de voyage qui avait commencé à se répandre, alors que lui, assis dans sa demeure de Dublin se demandait comment faire rôtir au mieux un pauvre enfant irlandais.


Quoi qu'il en soit, je doute que Norton ait eu de telles intentions lorsqu’elle a créé « les Chapardeurs » dans sa maison, dans une ville curieusement nommée Leighton Buzzard, nom qui fait penser à un cousin de la Mouette Jonathan Livingston, perpétuellement insatisfaite, expulsée de son rocher en 1970 vers notre meli-melo littéraire.


Certes, quelques esprits compliqués ont ajouté aux œuvres de Norton une sorte de symbolisme socio-politique d'après-guerre, en haut et en bas de l'échelle, mais je me demande s’ils n’ont pas cherché un sens caché là où le message était beaucoup plus inconscient, et constitue donc plutôt un propos subliminal accidentel sur la vie elle-même ; Un peu comme les personnages d'Alan Alexander Milne dans « Le vent dans les saules » qui ont vraiment accompli ce qu'il a fait après avoir démissionné de la Banque d'Angleterre, s'asseoir au bord de la Tamise, pour "simplement déconner avec des bateaux".


L'histoire de Norton dans le monde des Chapardeurs est tout aussi simple.


Une jeune femme remarque que ses accessoires de couture disparaissent sans cesse. Sa tante lui raconte l'histoire de gens miniatures qui "empruntent" des objets pour les utiliser dans leurs minuscules habitations, entre les murs et sous les planches.


Pour beaucoup, cela aurait été le début des cauchemars et de la peur d’éteindre les lumières, mais pour cette jeune femme, ce fut un grand réconfort que de savoir que ces petites créatures vivaient sous ses pieds. Elle mit donc tout en œuvre pour les sauver de l'attrape-rat ainsi que des autres haricots moins appréciés engagés pour débarrasser la maison de ces vermines.


L'origine des Chapardeurs, la façon dont ils sont arrivés dans leur habitation secrète dans la grande maison, ou comment ils ont évolué pour devenir si petits, est moins bien expliquée. En réalité, la seule réponse possible est qu’ils n’ont pas assez mangé de légumes ou qu’ils sont affectés par une sorte de maladie secrète, comme la Mrs. Pepperpot de l'auteur norvégien Alf Proysen, qui rétrécit de temps en temps à la taille d’un poivrier, pour retrouver sa stature habituelle au moment culminant de chaque livre, à la fin heureuse de ses aventures.


Cela est très différent du sort des voyageurs du vaisseau spatial suborbital le Spindrift, qui s'écrase à cause d'un orage magnétique alors qu'il se dirige vers Londres depuis Los Angeles. Ils survivent tous au crash, bien sûr, mais atterrissent sur une planète douze fois plus grande que la Terre, avec des habitants du même gabarit. La série de 51 épisodes du Pays des Géants a commencé un an avant que Neil Armstrong et Buzz Aldrin ne fassent "un petit pas pour un homme...", ce qui est en fait ce qu'il a dit, si quelqu'un avait été attentif.


Leurs aventures tournent bien sûr, autour de la petitesse des visiteurs qui passent un temps incroyable à être juste trop petits pour atteindre une table ou porter un équipement de taille géante, sur une planète qui n'est jamais nommée, mais qui a probablement été appelée d’un nom aussi ridicule que Leighton Buzzard.


Les périls des créatures minuscules ont également intéressé Clive Staples Lewis, dont la quatrième chronique narnienne raconte comment Jill, Eustace et le toujours joyeux Puddleglum, ont été sur le point de devenir le festin des géants de Harfang, dans The Silver Chair, et bien sûr Charles Lutwidge Dodgson, dont la grande notoriété tient à ses deux facettes : celle d'Alice, qui rétrécit et grandit avec les défis qui y sont associés, et son amour des adolescentes nues, qui, selon certains universitaires, aveuglés sans le savoir par leur système de justification intérieur, serait né d'une "incompréhension des mœurs victoriennes".


Mais il y a un thème qui traverse ces représentations et qui semble très différent des livres de Norton.


Tous ces personnages rendus plus petits ou plus grands ont la capacité, à un moment donné, de retrouver une taille proportionnelle à leur environnement.


Il y a toujours une lumière au bout de leur tunnel.


C'est peut-être là le commentaire le plus important sur notre société. Nous pouvons tous être petits et submergés à un moment donné, mais nous pouvons aussi être grands et égaux le moment d’après. Dans un pays, nous pouvons être de petits étrangers, dans un autre, de grands sauveurs.


Pour Norton, c'est un état d'esprit qui ne changera jamais. Ses Chapardeurs seront toujours de cette taille. Ils seront toujours confrontés à ces défis, et seront constamment en désaccord avec leur environnement immense et effrayant. S'ils parviennent à esquiver le chat et les outils qui tombent, ils pourront se mettre à l'abri, en se précipitant par la petite porte qui mène à leur propre monde miniature secret.


Dans mon couloir.

Photo by Suzy Hazelwood

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